Le Sommet de l’économie sociale 2025 a présenté la culture comme une force vitale. C’est vrai qu’elle façonne notre identité, tisse les liens entre les générations, anime nos territoires. Pourtant, elle est fragilisée – par la centralisation, par la logique de rentabilité, par des politiques publiques qui peinent à reconnaître sa pleine valeur.
Dans les régions comme dans les quartiers urbains, artistes, organismes et lieux culturels luttent pour exister. Et pourtant, ils tiennent bon. Ils innovent. Et souvent, c’est grâce à l’économie sociale qu’ils y parviennent.
La pandémie a été un choc, mais elle n’a fait qu’exacerber des fragilités déjà bien présentes. Le secteur culturel québécois peine à se relever :
Dans plusieurs MRC, il n’existe aucun lieu de diffusion artistique reconnu. Par exemple, dans le Bas-Saint-Laurent, 92 % des bibliothèques affiliées sont ouvertes moins de 10 heures par semaine. Le manque d’espaces de création abordables pousse les artistes hors des centres urbains, tandis que les petites municipalités peinent à financer la requalification de leurs bâtiments patrimoniaux.
Le taux d’emploi atypique dans le secteur culturel est l’un des plus élevés au Québec (44 %). La rémunération moyenne est inférieure de 30 % à celle des autres secteurs. Et pourtant, les artistes continuent de créer, de transmettre, de rassembler. Beaucoup le font au sein d’organisations collectives, qui misent sur la solidarité plutôt que sur la compétition.
Partout au Québec, des entreprises collectives en culture, en loisir et en tourisme jouent un rôle clé dans le développement local. Elles valorisent les identités collectives, créent des emplois, animent les milieux de vie. Elles ne cherchent pas le profit, mais le sens. Elles réinvestissent dans leur mission, dans leur communauté.
Le Québec compte plus de 1 100 entreprises collectives en culture, représentant environ 10 % de l’ensemble des entreprises collectives. À cela s’ajoutent 1 340 entreprises collectives en loisir et tourisme, qui participent aussi à la vitalité culturelle.
Prenons l’exemple du REFRAIN, un regroupement de 115 festivals artistiques indépendants présents dans 16 régions du Québec. Ce modèle permet une culture de proximité, accessible, inclusive, ancrée dans les réalités locales. Une culture qui ne dépend pas uniquement des grands centres, mais qui rayonne dans les villages, les régions, les quartiers. Une culture qui appartient à toutes et à tous.
Les défis sont nombreux : manque de lieux de création, précarité des artistes, sous-financement chronique, centralisation des ressources à Montréal et Québec. Pourtant, des solutions existent. Des projets collectifs transforment des églises en centres culturels, mutualisent des espaces de création, développent des festivals indépendants, soutiennent les métiers d’art et la médiation culturelle.
Ces initiatives ne sont pas marginales. Elles sont essentielles. Elles permettent de tisser du lien, de renforcer le sentiment d’appartenance, de faire vivre la langue française, de transmettre des savoirs, de créer de la beauté et du sens.
Le cahier thématique propose plusieurs pistes d’action structurantes :
Repenser la culture, c’est repenser notre rapport au territoire, à la langue, à la mémoire, à la communauté. C’est refuser que la culture soit un produit comme un autre. C’est affirmer qu’elle est un bien commun, un droit, un moteur de transformation sociale.
L’économie sociale nous offre les outils pour bâtir une culture vivante, enracinée, accessible. Encore faut-il que les politiques publiques suivent.
Je m’appelle Charlotte Lafond-Desmarais. Je suis passionnée par notre territoire, nos communautés, la culture et les projets collectifs qui redonnent vie à nos milieux. J’ai eu le privilège de participer au Sommet de l’économie sociale 2025. Cet événement a été riche en idées, en rencontres et en perspectives. À travers cette série de chroniques, je partage les réflexions et les pistes d’action qui en ont émergé. Mon objectif : nourrir la discussion et mettre en lumière les initiatives porteuses.